Littérature courte, Microfictions et Histoires minute

Sa joie avait un goût de déjà vu. Impossible : c’était son premier accouchement. Paniquée, elle vit disparaître son bébé, toute la pièce, puis elle-même.

— Saoule ! s’écria le joueur. Cinq fois que je relance cette sauvegarde et à chaque fois c’est un garçon qui naît.

Né dans une famille de non-sorciers, il s’était passionné très tôt pour la physique et les principes de Lavoisier se heurtaient aux cours de création magique qu’il suivait. Le professeur confirma : “Rien ne se crée en effet. Ce qui apparaît ici disparaît ailleurs.”

Yeux lasers, force colossale, capacité de voler ? De la gnognotte. Le pouvoir le plus terrifiant, c’est celui de l’Horloger. Il manipule le temps. Ou plus exactement, le rythme de vos cellules. Il vous fait vieillir de trente ans en une minute. Sans retour possible.

— Mais… C’est affreux ! Inaudible ! La commande était claire : “La musique des sphères” ! Évoquer les étoiles, les galaxies, le cosmos ! Pas… cette… bouillie !

— Parce que vous vous imaginiez l’Univers autrement qu’un amas discordant d’ondes éparses et chaotiques ?

L’Oracle avait compris que le futur était trop complexe, trop ouvert aux manipulations innombrables de chacun pour être lu et encore moins prédit. Tout juste arrivait-elle à prévenir le vieil ermite de ses très rares visiteurs – les messagers de l’Oracle.

Les activités du Cercle des sorcières étaient bien moins sulfureuses qu’imaginées.

Club de lecture (“tu penses quoi de ce grimoire ?”), échange de recettes (“un poison à tomber !”), confection de poupées (vaudou)…

Comme dans ces déserts terrestres où une seule pluie provoquait des fleuraisons instantanées, cette planète voyait sa flore s’épanouir quand une mission d’exploration l’atteignait. Celles-ci en repartaient rarement : les plantes étaient carnivores.

L’environnement spatial modifiait la biologie au point de rendre impossibles les naissances entre Terriens et Martiens. Loin d’être admirés, les itinérants capables, à grand renfort de chirurgie, de vivre sur les deux planètes étaient qualifiés d’hybrides.

Face aux pénuries, la recherche informatique s’échina à remplacer silicium et terres rares. Le carbone abondait : ainsi naquirent les premiers ordinateurs organiques. Ils utilisaient de nombreux atouts du vivant – et beaucoup moins de gens osaient leur crier dessus.

Soit disant, une utopie comprenait toujours une part dystopique : le ver du malheur se cachait dans le fruit. La répression des premières communautés utopiques rendit évident que la dystopie luttait pour sa domination.

Seul le nombre assurerait la survie du rêve.