Je ne suis pas parfait

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… mais je me soigne. Et si on s’accompagnait sur le chemin de la guérison ?

Anne HathawayAnna Hathaway a renoncé à être parfaite, annonçait-elle il y a peu en couverture d’un magazine féminin (j’évite le pléonasme en vous épargnant le “quelconque”).

Bah tiens. Moi aussi, quand j’aurai une carrière hollywoodienne bien lancée avec des auteurs indépendants sur Brokeback Mountain, des films de studio qui s’habillent en Prada, la critique derrière moi et les fans qui bavent devant, je me dirai la même chose. On lit de ces choses, j’vous jure.

D’accord, d’accord, je suis de mauvaise foi, j’admets bien volontiers comprendre son message, très politiquement correct, d’acception de soi tel qu’on est, du refus de plaire à tout prix à tout le monde, bla bla bla… OK. Je ne peux pas être d’accord avec la forme, cependant. Les mots ont un sens, comme dirait l’autre. Et donc non, je renonce pas à être parfait. Je reste insatiable sur tous les sujets – mais j’ai effectivement renoncé à vouloir tout comprendre sur tout. Dont acte : j’écoute toujours mes podcasts de France Culture, mais si le sujet me saoule au bout de dix minutes, le fichier saute. Oui, je cherche à me perfectionner via l’enrichissement de ma culture, tout en sachant que je ne pourrai jamais tout connaître – et encore moins tout comprendre.

L’exhaustivité, j’en suis revenu. Okakura Kakuzo relate une anecdote concernant un maître de thé et son élève. L’élève vantait le maître car sa collection était bien plus importante que celle du plus célèbre maître de thé. Ce compliment était en fait un sujet de lamentation pour le maître, qui fustigeait son propre manque de fermeté et de décision dans ses choix. Tout ? Non. Le meilleur ? Certainement.

Cela implique une certaine dose de radicalité, bien sûr, de courage : sans partir dans la provocation gratuite, il n’y a pas de honte à ne pas aimer ce qu’adore le voisin. Être soi, donc. Ce qui n’interdit pas d’accepter la critique. Bien sûr, nous effectuons la plupart des choses que nous faisons parce que nous les pensons bonnes. Cependant combien d’entre nous acceptent de se remettre en question, spontanément ou suite aux remarques d’un proche ? Difficile en effet de concilier fermeté de sa décision et ouverture d’esprit permettant une remise en question.

En rangeant mes placards, je suis tombé sur un vieil exemplaire du Monde dans lequel traînait cet intéressant article, qui par un bonheur inexplicable, reste disponible des mois après sur internet. Une notion qui y est développée pourrait se résumer par l’aphorisme “La critique n’est que de la gentillesse déguisée“. Nous arrivons encore assez facilement à signaler à un inconnu ou une relation de travail qu’il a un morceau de patate sur la joue, cela se complique fortement quand il commence à avoir mauvaise haleine. Pourtant à qui rendrions-nous le plus service ? Au chacal qui nous empeste, sans doute : on sera sans doute plus enclins à lui parler si la moindre de ses réponses ne manquait pas de nous provoquer une syncope. Vassili Grossman parle des petites bontés. La volonté de faire le bien, plutôt que de passer par des idéologies de masse qui peuvent tourner au totalitarisme, s’exprimera plus facilement, peut-être même plus efficacement à travers de petites actes altruistes, menés de proches en proches, et ce sans risque de détournement. La gentillesse, au sens positif et valorisant du terme, encore une fois.

Ce sens critique, avant tout pour soi autant que pour les autres, ne doit pas non plus, selon moi, nous emmener dans une spirale infernale de dépréciation (confère la grande philosophe Anne Hathaway ci-avant, et le sage Lao-Tseu qui recommande de la modération en toute chose, y compris en modération).

En fin de compte, le premier défi consiste à cesser de râler, comme l’excellent blog Bonne Nouvelle nous y enjoignait. C’est pas gagné. Mais pas perdu.

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