Trois petits exemples des abus au quotidien des entreprises chargées de collecter de l’argent “pour les reverser aux auteurs”.
Dans une autre vie, pas si lointaine, j’étais président d’une association qui s’avérait être surtout une troupe de théâtre. On a beau être saltimbanques, msieurs dames, nous étions en accord avec la loi et avions donc un statut juridique. Nos rangs abritaient ceux d’un auteur qui avait le bonheur d’être édité. Nous jouions ses pièces et comme il jouait sur scène avec nous et n’était pas totalement atteint de masochisme profond, il avait passé un accord avec son éditeur.
L’accord consistait, simplement, à une exemption de droits à payer sur ses pièces pour notre compagnie. C’était parfaitement légal et honnête : il ne grèvait pas les comptes de la troupe pour se verser un “salaire” et évitait ainsi de créer un différent financier avec les autres comédiens. Notre auteur n’étant pas inscrit à la SACD, il n’était par aucun autre contrat que celui de son éditeur. L’accord était parfait. Advint une représentation au festival des Tragos (aujourd’hui menacé d’explusion, mais c’est une autre histoire). Quelques jours après la représentation, de retour au bercail, je reçois un coup de fil d’un représentant de la SACD qui nous réclamait les droits d’auteur que nous n’avions pas versé.
Vous vous douterez que je m’étais empressé de moucher l’imprudent. Déjà à l’époque, ils mettaient en pratique les meilleures méthodes de hameçonnages qui font le succès des arnaques sur internet. Et si j’avais été mal informé de la situation entre l’auteur et son éditeur, la compagnie de théâtre aurait payé et l’auteur n’aurait rien touché.
J’apprends coup sur coup deux autres exemples de grands n’importe quoi “au nom des auteurs”. Le film The Hobbit se prépare actuellement à Hollywood, racontant, d’après le bouquin éponyme de Tolkien, comment Bilbo trouva le fameux Anneau qui ferait l’objet de toutes les convoitises dans le désormais bien connu Seigneur des Anneaux (les livres, puis les films). Un petit malin dans un bureau d’avocat, a trouvé judicieux de réclamer à un pub (un bar, quoi) de changer son nom ou de payer des droits.
The Hobbit has been threatened with legal action by the Saul Zaentz Company, who own the merchandising and film rights to all of Tolkien’s works and have done for 35 years, and are being forced to rebrand. Obviously, it wouldn’t be our beloved Hobbit if it weren’t The Hobbit anymore, and whilst copyright must be respected it seems as though this legal case is being put forward for the wrong reasons – the SZC had an ongoing dispute with New Line Cinema over The Lord of the Rings and The Hobbit films, and as a way of exerting their power over the legal rights, have started forcing small companies to rebrand. This is not right, and we can’t just let this happen. We must unite to stop this!
trad :
The Hobbit a été menacé de poursuites par la Saul Zaentz Company, qui détient les droits pour le merchandising et les droits filmiques des travaux de Tolkien et ce depuis les 35 dernières années. The Hobbit doit donc se rebaptiser. Cependant, ce ne serait plus notre bien aimé “Hobbit” si ce n’était plus The Hobbit, et bien que le droit d’auteur doive être respecté, il semble que cet appareil judiciaire soit mis en branle pour de mauvaises raisons : la SZC est en conflit avec New Line Cinema à propos des films du Seigneur des Anneaux et The Hobbit, et exerce son pouvoir légal en obligeant des petites entreprises à changer de nom. Ce n’est pas juste et nous ne pouvons pas laisser ceci advenir. Nous devons nous unir pour l’empêcher.
Voila voila voila. En gros, quand les gros se fâchent pour des gros sous, égorgeons des chatons pour montrer qu’on ne rigole pas. Je ne crois pas que soit prévu un parc à thème “Terres du milieu” dans un rayon de 200km autour de ce pub. Je ne crois pas qu’il faille renommer les écoles ou les crèches qui auraient pour nom des personnages de contes ou des noms de poètes. Mais je peux me tromper… Stephen Fry, auteur et réalisateur bien connu, qui fait partie du casting du film actuellement en tournage, a même rejoint le comité de soutien. Vous pouvez en faire autant, sur Facebook ou sur Twitter.
Enfin, j’apprends sur l’excellent blog de Nikopik que l’équivalent outre-Quievrain de la SACD, la SABAM, s’amusait à raconter une histoire belge. En substance, je vous la fais courte mais sourcée, la SABAM demande aux bibliothèques qui organisent des lectures gratuites de payer des droits d’auteurs. Ces lectures ont bien souvent vocation à diffuser l’envie de lire auprès des enfants et à créer une vie culturelle pour les plus grands. Bref, à entretenir le tissu social, la curiosité et la vie. Et bien ce travail se paye ma bonne dame, aux auteurs, soit-disant. J’en connais des auteurs pour enfants. Ils sont au salon de Montreuil tous les ans. Je mettrais ma main à couper qu’ils préféraient que leurs livres soient lus dans des lectures gratuitement plutôt qu’ils dorment chez les éditeurs et finissent au pilon comme invendus.
Car encore une fois, un livre lu, c’est un livre qui vit, que des gens auront donc envie d’acheter.
Ces gens sont fous. Soutenez la création indépendante.